Madame Roselyne Bachelot connaît la chanson, pardon l’opéra. À 15 h 30 sonnantes, elle arrivait pour présider à la passation de pouvoir entre M. Stéphane Lissner et M. Alexander Neef, dans le salon du ministère de la Culture. Tout s’est déroulé dans une atmosphère très mozartienne, proche de « Cosi fan tutte », pas une fausse note, harmonie parfaite.
Madame le ministre a déclaré entre autres : Cette cérémonie est inédite dans l’histoire de ce ministère ? Il y a urgence à plus d’un titre pour l’Opéra de Paris.
« J’ai considéré qu’il était de ma responsabilité d’accélérer cette transition, en demandant à M. Lissner de bien vouloir partir le premier septembre et à M. Neef de bien vouloir avancer sa date d’arrivée.
la succession des conflits sociaux de l’hiver dernier, ceux qui ont impacté l’Opéra de Paris auparavant, et la crise sanitaire du Covid 19 ont laissé l’établissement artistiquement et financièrement exsangue avec quasiment plus aucun lever de rideau depuis décembre dernier. »
Pour faire comprendre l’urgence, Madame Bachelot dit, et ne chante pas, les dernières phrases émouvantes chantées par Woglinde et ses sœurs dans le Prologue de l’Or du Rhin de Wagner. Puissiez-vous excuser mon incompétence, Madame, je ne les connais pas par cœur. Mais votre voix douce et votre diction étaient si parfaites, que nous eussions pu avoir l’impression d’être dans l’un de ces rares théâtres, où l’on entend encore sans peine, dans les plus hautes places, chaque mot dit sans forcer la voix par les comédiens.
Monsieur Lissner a été loué : » Vous pouvez partir la tête haute.. » et les mécènes, dont certains étaient présents, remerciés pour leur fidèle générosité.
Quelques mots de bienvenue pour M. Alexander Neef. « Vous pouvez compter sur moi. J’assumerai mes responsabilités. Le déficit d’exploitation des années 2020 et 2021 sera partiellement remboursé par le ministère. »
Sans contrepartie ? Pas tout à fait. Nous avons entendu entre autres :
« L’Opéra va devoir se transformer en profondeur.
Le Ballet est dépositaire d’un patrimoine unique au monde. C’est tout le modèle de fonctionnement qu’il faut repenser.
Il faut s’attaquer au modèle. Cette accélération soudaine et acrobatique des problèmes des derniers mois demande cette transformation, c’est certainement dans l’intérêt de l’établissement. »
Pour aider à ces transformations, Madame le Ministre a nommé trois personnes qui resteront à l’extérieur de l’établissement pour faire des propositions « sans concession » pour le printemps 2021.
Messieurs Georges François Hirsch et Christophe Tardieu pour ce qui concerne l’organisation interne et Madame Caroline Sonrier. Cette dernière devra proposer des améliorations avec les Maisons d’Opéra et les théâtres lyriques de France, dont certains sont hélas particulièrement pauvres financièrement, mais d’excellente qualité artistique. Rappelons qu’il y en a une quarantaine en France, sous diverses formes.
Cette décision est très importante pour la relance d’une politique de l’Opéra et de la Danse. Il y a beaucoup à faire pour une amélioration et une aide de l’insertion des jeunes chanteurs.
Pour ce qui concerne la danse, l’idéal serait que l’on puisse arriver à rétablir des ballets dans tous ces opéras qui en sont dépourvus depuis les années génocides, 1984 – 1992 où tout a été fait avec bêtise et cruauté pour les faire disparaître. Je pense à Dijon, Lille, (40 danseurs), Rennes, Angers, Reims, Tours, Limoges, Toulon. Remède idyllique pour les jeunes danseurs des grandes écoles de danse qui se retrouvent sans aucun débouché. Sauf erreur de ma part, en Allemagne, tous les opéras ont une compagnie de ballet.
Sans vouloir m’occuper de ce qui ne me regarde pas, au lieu, une énième fois de vouloir modifier l’organisation interne de l’Opéra à la manière franco franchouillarde, en restant enfermés dans la tour d’ivoire, il conviendrait peut-être surtout de procéder par comparaison avec les Maisons qui fonctionnent sans problème. Quelles organisations à Londres, Munich, Stuttgart, Hambourg, Berlin, New York, Toronto ? Là, Monsieur Alexander Neef y était il y a quelques jours encore, il a déjà fait la comparaison depuis longtemps.
Apparemment, Madame le ministre semble revenir quelque peu, en le mettant à jour, à l’ambitieux et généreux projet de Marcel Landowsky pour les Opéras de France, qui a hélas été jeté à la poubelle quelques semaines après son départ de la direction de la Musique, d’où l’immense retard, si l’on compare avec l’Allemagne, pris par ces établissements depuis 35 ans. Que de temps perdus et de talents gâchés !
Nous en sommes à notre vingt-cinquième ministre de la Culture, ne me demandez surtout pas les noms, Pour la première fois, une fois, il y a une personnalité qui maîtrise le sujet.
Madame Roselyne Bachelot connaît l’Opéra, et toutes des Maisons réparties sur le territoire, parce que, comme elle l’a rappelé, elle s’y est rendue très régulièrement depuis longtemps, ce qui n’est pas une sornette. Elle sait de quoi elle parle, la chose est si rare qu’il faut la souligner.
Monsieur Alexander Neef a déclaré entre autres : « Je ressens beaucoup d’humilité face à la situation. »
« Il faut faire place à toute la diversité de la société. »
« Mon ambition est d’engager non une révolution, mais une évolution. »
Il me semble qu’il convient de remercier très sincèrement Monsieur Stéphane Lissner. Quelques jours après son arrivée, il a su mettre une fin immédiate à la désastreuse descente aux Enfers du Ballet. Cette compagnie était devenue, au fil de trop longues années de décadence perlée, une sorte d’auberge espagnole où n’importe qui faisait n’importe quoi. Tout allait à veau l’eau, personne ne s’occupait de la santé physique et morale des danseurs ; seuls les chouchous que l’on ne voyait jamais danser étaient admis au sein du Califat. Heureusement, cette sinistre période est oubliée, des jeunes talents ne demandent qu’à être reconnus. Alors bonne chance à tous, que l’on chante et que l’on danse ! Michel Odin
Voici le texte du service de presse du ministère de la Culture.
Cérémonie d’accueil à Alexander Neef à la tête de l’Opéra national de Paris et annonce de la création de deux missions
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la Culture, est heureuse d’accueillir Alexander Neef à la direction de l’Opéra national de Paris et d’annoncer le lancement de deux missions sur les perspectives de l’Opéra national de Paris et la politique d’accompagnement de l’art lyrique en France.
Roselyne Bachelot-Narquin a souhaité organiser, au ministère de la Culture, ce mardi 1er septembre, la cérémonie de passage de relais à la tête de l’Opéra national de Paris entre Stéphane Lissner et Alexander Neef.
Stéphane Lissner, qui aura dirigé l’Opéra national de Paris pendant 6 ans, en proposant une programmation riche et audacieuse tout en veillant à diversifier les ressources de l’établissement, est désormais le directeur du théâtre lyrique San Carlo de Naples, où il exerce son talent au service de l’un des plus prestigieux et anciens théâtres lyriques d’Europe.
Alexander Neef, qui avait été nommé en juillet 2019 directeur préfigurateur de l’Opéra national de Paris, devient à partir du 1er septembre son directeur général. En parallèle de ses nouvelles missions de direction, il conservera ses responsabilités auprès de la Canadian Opera Company jusqu’à la prise de fonction de son successeur.
Alexander Neef propose pour l’Opéra national de Paris un projet lyrique et chorégraphique ambitieux, qui accorde une place importante au répertoire français et conjugue le maintien d’un niveau artistique d’excellence avec les enjeux de démocratisation, de recherche de nouveaux publics et de développement de l’éducation artistique.
Lors de cette cérémonie, Roselyne Bachelot-Narquin a également annoncé le lancement de deux missions :
Une mission sur les perspectives et les modalités d’accompagnement et de soutien de l’Opéra national de Paris
Afin d’éclairer les décisions qui devront être prises pour l’avenir, une mission est confiée à Georges François Hirsch, ancien administrateur de l’Opéra national de Paris et à Christophe Tardieu, ancien directeur adjoint de l’établissement. Dans le contexte de la crise sanitaire, il leur reviendra de réaliser un état des lieux et dresser des perspectives d’avenir à moyen et long terme pour l’Opéra.
Les conclusions de cette mission sont attendues pour fin novembre 2020.
Une réflexion sur la politique de l’art lyrique en France.
Une seconde mission sera confiée à Caroline Sonrier, directrice de l’Opéra de Lille, avec pour objectif de dresser un état des lieux de l’art lyrique en France, en examinant l’offre artistique existante, les différents modèles économiques, ainsi que les politiques de démocratisation poursuivies par les théâtres lyriques dans les territoires.
Elle dessinera un cadre de référence pour la pratique de l’art lyrique en France, avec des propositions visant à assurer la pérennité de ce secteur. La mission sera particulièrement attentive à l’inscription territoriale des opéras, en lien avec les collectivités partenaires, au soutien aux jeunes compositeurs et interprètes, ainsi qu’aux collaborations que les maisons d’opéra peuvent entretenir les unes avec les autres.